Résolution politique

« UN PACTE HISTORIQUE POUR LE PARACHEVEMENTDU PROJET NATIONAL »

L’insurrection civique pacifique du 22 février 2019, après les soulèvements populaires successifs depuis l’indépendance du pays, a ouvert la voie à la réconciliation historique et au parachèvement du projet national basé sur la Proclamation du 1er novembre 1954 et de la plate-forme de la Soummam.

Le rêve d’une Algérie libre et heureuse est redevenu possible.

La mobilisation populaire sans précédent a scellé l’unité du  peuple et son profond attachement à son histoire, à sa  mémoire et à des valeurs communes et a traduit avec force et admiration la volonté de nos compatriotes de repenser la Nation et de se projeter pour construire collectivement cet avenir de paix, de prospérité et de justice, grande promesse historique de nos glorieux martyrs de la libération nationale.

Les dirigeants du pays, atteints du syndrome destructeur des dits « printemps arabe », auraient dû faire preuve de lucidité politique et se saisir du potentiel politique extraordinaire que recelait cette dynamique populaire pour l’encadrer et l’orienter, en accord avec les forces d’opposition patriotiques, dans la perspective d’un changement politique profond, ordonné et progressif qui préserve l’Etat national et renforce les défenses politiques immunitaires de la Nation.

Car, quel meilleur garant pour le renforcement de la Sécurité nationale sinon la mobilisation consciente et librement organisée des citoyens autour de la défense de l’Etat national ?

L’instrumentalisation, sur fond de manipulation irresponsable des facteurs identitaires et régionaux de cette exceptionnelle mobilisation populaire, pour la vider de tout sens politique par les fractions antinationales et antisociales du système en collusion objective avec des groupes radicaux hostiles à toute solution politique ne recherchant que le désordre et le chaos pour ouvrir la voie à l’intervention étrangère, sont parvenus à étouffer toutes les initiatives d’auto-organisation de la société.

Le régime aurait tort de se réjouir d’un nouveau vide politique car les fragilités politiques et économiques persistantes ne mettent pas le pays à l’abri de nouvelles crises et de nouvelles révoltes. Le refus de médiations politiques et sociales expose notre pays à des risques d’instabilité et de violence susceptibles de provoquer des ingérences étrangères.

Le moment est venu de se raviser et d’apporter enfin La réponse politique et institutionnelle conforme aux aspirations populaires et aux défis immenses auxquels notre nation est confrontée.

LE DANGERS DU STATUT QUO ET DE LA CONFUSION ENTRE ETAT ET POUVOIR

Il ne s’agit pas aujourd’hui de dresser un diagnostic à charge des politiques menées depuis l’indépendance ou de succomber à des approches binaires ou manichéennes. Mais il est important d’établir un bilan sans complaisance pour faire éviter à notre pays de nouvelles impasses stratégiques et de nouvelles tragédies.

Le Système du pouvoir hérité à l’Indépendance, qui a dégénéré durant les vingt dernières années en un « Non-système », ne peut plus garantir durablement la stabilité et la sécurité nationales. Les multiples crises, cycliques, qui ont durement et tragiquement secoué le pays trouvent leur cause principale dans la négation du peuple en tant que principal acteur de son destin et le refus de la structuration autonome d’organisations politique, syndicale et associative.

Chaque période de crise qui prend naissance à l’intérieur même du système de pouvoir, consécutivement à un rétrécissement de la rente des hydrocarbures, met en danger la pérennité de l’Etat-national et la cohésion du pays.

La confusion entre Etat et Pouvoir, entretenue aussi bien par les dirigeants du pays et ceux se réclamant d’une opposition dite « radicale », entrave l’émergence d’une culture politique institutionnelle nourrie par un sens aigu de l’Etat et de l’intérêt général.

Cette forme pré-politique d’exercice de l’autorité maintient les institutions prisonnières des relations personnelles, familiales voire tribales et régionalistes. Il en résulte un processus décisionnel complexe, opaque et inefficace, hors de tout arbitrage institutionnel, qui condamne le pays à l’immobilisme en décourageant toutes bonnes volontés et en neutralisant toute velléité réformatrice qui libère les forces vives et productives de la société.

Quels que soient les intentions affichées par les autorités du pays, celles-ci ne trouveront pas une traduction concrète sur le terrain tant que la logique sécuritaire et bureaucratique prédominera et supplantera l’approche politique dans la gestion des affaires publiques.

QUEL MODELE DEMOCRATIQUE POUR L’ALGERIE ?

Le modèle démocratique revendiqué dès sa fondation en 1963 par le FFS puise ses références dans l’Appel du 1er Novembre 1954, texte fondateur de l’Algérie indépendante, et des résolutions du Congrès de la Soummam qui ont précisé la nature sociale et démocratique de l’Etat algérien.

Ce modèle démocratique s’enracine dans nos traditions historiques et nationales, se nourrit de nos valeurs séculaires, spirituelles et civilisationnelles et de nos traditions sociales égalitaires, transmises par la mémoire collective et véhiculées par les langues arabe et amazigh qui ne recouvrent pas deux aires culturelles distinctes mais constituent le creuset de notre identité nationale : L’Algérianité. Ces deux langues nationales et officielles doivent être promues et mises à l’abri de toute instrumentalisation politique et idéologique.

Le FFS a d’emblée fermement rejeté le « modèle démocratique libéral », considéré à tort comme Universel, qui consacre la dictature du marché et la domination exclusive du capital financier et porte en lui, comme la nuée porte l’orage, les germes de la violence sociale, des inégalités profondes, de la dérive oligarchique et de la neutralisation de l’Etat national et sa transformation en un agent de propagation de l’idéologie néolibérale totalitaire, négatrice de la souveraineté populaire.

Le modèle démocratique pour lequel des générations de militantes et de militants se sont battues, au prix pour certains de leurs vies, suppose la réhabilitation du politique et de la politique et l’enracinement à tous les niveaux de la vie en société d’une culture de dialogue, de la négociation et du compromis.

Le FFS aspire à la mise en place d’une Démocratie Représentative avec une approche participative et citoyenne, ancrée sur la recherche du consensus autour du bien commun.

La société algérienne, profondément déstructurée par le système colonial puis par des options hasardeuses et irréfléchie après l’indépendance, a été privée des ressorts politiques et culturels nécessaires à l’émergence et la structuration d’une société politique et civile forte et dynamique.

La méfiance vis à vis des formes autonomes d’organisation sociale et politique et l’obsession des équipes dirigeantes qui se sont succédées au pouvoir de tout neutraliser à défaut de tout contrôler n’a pas permis l’enracinement d’une culture citoyenne. L’école instrumentalisée à des fins de propagande idéologique, au service du pouvoir ou de mouvements obscurantistes, n’a pas permis l’émergence d’une culture politique et de dynamiques conscientes des enjeux et des défis du moment.

QUELLES MISSIONS POUR LE FFS AUJOURD’HUI ?

AU PLAN POLITIQUE

Nulle personne, nul groupe, nulle institution n’a le droit ni la légitimité d’engager l’avenir de la nation sans réaliser au préalable un consensus national.

Pionnier des luttes démocratiques, les congressistes du FFS rejettent les logiques de rupture et les voies séditieuses faussement révolutionnaires en privilégiant celles, plus politiques, plus pacifiques, du dialogue et du compromis.

La lutte politique est un instrument de construction de la société et de l’Etat de droit aussi sûrement que la dépolitisation est une arme de destruction massive de la société en préalable à l’effondrement de l’Etat.

A la lumière d’une situation politique marquée par une glaciation autoritaire, l’échec d’une classe politique impuissante à traduire les aspirations des algériennes et des algériens, la fragmentation sociale et le désengagement de nos concitoyens, les congressistes du FFS décident d’axer prioritairement les missions du parti autour :

    • De la nécessité de la reconstruire les outils et les instruments de mobilisation citoyenne en faveur d’un réel changement politique qui consacre l’Etat de droit,  la démocratie politique, économique et sociale.
    • De la construction d’une dynamique d’Union politique des forces nationales et patriotiques autour de la préservation de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale, du caractère républicain de l’Etat, de la séparation des pouvoirs, de l’Etat de droit, du respect des droits de l’Homme et des libertés publiques.

Dans cette perspective, les congressistes du FFS mandatent les instances issues du 6e Congrès National du Front des Forces Socialistes de travailler à la mise en place d’un cadre idoine au rassemblement des personnalités politiques, intellectuels, journalistes, militant(e)s politiques, syndicalistes et associatifs autour de l’élaboration collective d’un Pacte Historique pour le Parachèvement du Projet National.

Ce cadre ne se devrait être aucunement exclusif et travaillera en synergie avec d’autres initiatives politiques et citoyennes avec pour objectif de rassembler les énergies patriotiques constructives du pays et d’engager les futures batailles politiques qui permettront à l’Algérie de sortir définitivement d’un dangereux statuquo en l’engageant durablement dans la voie de la démocratie, de l’Etat de droit et du développement économique, social et culturel.

AU PLAN ECONOMIQUE

Les congressistes du FFS soulignent l’urgence d’entreprendre les grandes réformes indispensables pour permettre la diversification de l’économie nationale. L’économie algérienne doit s’affranchir définitivement de la rente des hydrocarbures et des contres chocs extérieurs que provoquent l’incertitude et l’instabilité de l’économie mondiale.

La défense de la souveraineté du pays sur son territoire et ses ressources, l’indépendance économique du pays et un développement national durable et autocentré doivent demeurer nos objectifs.

Ces réformes devront s’inscrire dans le cadre institutionnel d’une planification stratégique pour définir des programmes de développement structurels et sectoriels à moyen et long terme dans les domaines notamment, de l’agriculture, de l’industrie, du tourisme, des technologies numériques et de la transition énergétique.

Nous devons réunir les meilleures conditions de mobilisation de toutes les compétences et énergies nationales et celles de notre diaspora afin de créer un environnement favorable à l’investissement attractif, transparent et affranchi de la corruption et des pratiques bureaucratiques. C’est une condition sine qua non pour réaliser une croissance économique réelle, diversifiée et durable, ainsi que la création d’emplois pour lutter contre le chômage et continuer la mission de redistribution sociale de l’Etat.

Les ressources financières du pays, issues principalement des revenus générés par la transformation et l’exportation des hydrocarbures, doivent être mobilisées pour le financement de grands projets structurants, l’investissement dans la production créatrice de richesses et la lutte contre les déséquilibres  territoriaux en prenant en compte leurs spécificités géographiques et économiques.

Il faut réhabiliter la valeur travail et tourner définitivement la page du détournement et du gaspillage des ressources du pays aux fins d’entretenir des clientèles parasitaires et acheter une hypothétique « paix sociale » au détriment du développement national.

AU PLAN REGIONAL ET INTERNATIONAL

Les choix géopolitiques et stratégiques doivent obéir en permanence aux impératifs dictés à la fois par l’intérêt national et par l’indispensable respect des engagements moraux, éthiques et historiques liés aux principes sacralisés par notre lutte de libération nationale.

La stratégie de Non-Alignement, héritage de la Conférence de Bandung de 1955 et du contexte de guerre froide, doit évoluer pour se départir d’un neutralisme passif qui, dans un monde en décomposition-recomposition, peut conduire à un isolement d’autant plus inquiétant qu’à nos frontières se forment, des coalitions militaro-stratégiques hostiles à notre pays avec le risque, pour se protéger, de céder à la tentation d’accorder des concessions stratégiques aux grandes puissances.

Dans un monde en profonde mutation historique vers la multipolarité, notre pays doit se saisir des immenses opportunités offertes pour repenser nos stratégies d’alliance qui mettront fin de façon définitive aux tentations néocolonialistes et nous propulseront au rang de grande puissance régionale et continentale.

Dans ce cadre, les congressistes du FFS considèrent que la perspective historique et stratégique d’une intégration à l’organisation des BRICS exige la mise en œuvre urgente, concertée et planifiée de profondes réformes politiques et économiques.

Notre pays devra repenser la nature de ses relations avec les pays de la rive nord de la méditerranée dans l’objectif d’un partenariat mutuellement avantageux avec comme perspective un partage de la valeur et un vrai transfert technologique.

La profondeur maghrébine, africaine, méditerranéenne et moyenne-orientale doit être privilégiée pour sortir d’une dépendance vis à vis d’un monde euro-atlantique impérialiste et belliqueux, aujourd’hui largement contesté par la montée irrésistible de nouveaux pôles de puissance plus respectueux des souverainetés politiques et économiques ainsi que des principes onusiens de non-ingérence dans les affaires internes des Etats.

Les congressistes du FFS s’engagent à soutenir toutes les initiatives visant à soutenir le droit des peuples à l’autodétermination dans le cadre du strict respect de droit international et des résolutions onusiennes.

Les congressistes du FFS restent profondément attachés à la construction du Grand Maghreb des Peuples. Ce projet, voulu par les pères fondateurs de nos pays, est un impératif stratégique et vital pour notre région afin de faire face aux enjeux et aux bouleversements qui s’opèrent au niveau international. Toutefois, la construction de ce grand ensemble Nord-Africain ne pourra garantir nos indépendances et nos souverainetés que s’il se construit de façon autonome, loin de toute forme de soumission à des puissances (néo)impérialistes et (néo)colonialistes. De même ce grand ensemble régional ne pourra se construire sans la volonté des peuples qui le constituent.

L’APPEL DES CONGESSISTES DU FFS

Les congressistes du FFS, réunis à l’occasion du 6° Congrès National du Front des forces Socialistes tiennent à rendre hommage et honorer la mémoire de notre Président fondateur du FFS, Hocine Ait Ahmed, dont le long et inlassable combat pour l’unité nationale, la paix et la démocratie en Algérie demeure pour nous et pour l’ensemble des Algériennes et Algériens source d’inspiration et de force pour poursuivre le combat sur le chemin qu’il nous a tracé.

La responsabilité politique exige, aujourd’hui plus que jamais, dans un monde dont les équilibres sont totalement bouleversés, de tout entreprendre pour ne pas faire rater cette nouvelle chance historique qui s’offre à nous afin de redresser le pays et le protéger  aux effets destructeurs des guerres de 4ème générations en faisant preuve d’une vigilance renforcée et en élevant le niveau de conscience politique de nos concitoyens

Les congressistes du FFS appellent l’ensemble des acteurs politiques, économiques, sociaux et culturelles à se hisser à la hauteur des défis historiques et des attentes légitimes du peuple et à se tourner résolument vers l’avenir en surmontant les divergences secondaires et en se libérant du sectarisme et des « aççabyates » pour se rassembler autour d’un même idéal, d’une même espérance, celle d’une Algérie libre, démocratique, souveraine, réconciliée et prospère.

Gloire à nos martyrs, Vivre l’Algérie, libre, démocratique et heureuse, Vive le FFS.